Comment faire une analyse de double matérialité : la méthode complète

Par Stéphanie Biron
20 janvier 2025
4 min
Sommaire

L’analyse de double matérialité permet de décrypter en profondeur les enjeux ESG d’une entreprise, qu’il s’agisse d’impacts environnementaux, sociaux ou de gouvernance, ainsi que des défis et opportunités qui en découlent.

L’objectif est simple : identifier les leviers clés pour renforcer la performance et la résilience de l'organisation à l’heure de la transition durable.

Mais quelles sont les différentes étapes de l’analyse de double matérialité ? Comment constituer une liste complète des enjeux ESG de son entreprise ? Et comment évaluer le niveau d’importance de chacun de ces enjeux ? Nous vous livrons tous nos conseils sur le sujet.

L’analyse de double matérialité, socle du reporting CSRD

“Double matérialité” : de quoi parle-t-on ?

La notion de double matérialité repose sur une approche élargie de l’impact des entreprises. 

Elle combine deux perspectives complémentaires :

  • La matérialité financière, qui examine comment les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) influencent la performance économique et financière de l’entreprise.
  • La matérialité d’impact, qui évalue comment les activités de l’entreprise affectent la société et l’environnement.

Cette double lecture permet aux entreprises de mieux comprendre leurs risques et opportunités dans un monde en pleine transition durable.

Un concept au cœur de la CSRD

La directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) fait de l’analyse de double matérialité une véritable pierre angulaire du reporting extra-financier. Cette nouvelle réglementation exige en effet des entreprises qu’elles intègrent à la fois la matérialité d’impact et la matérialité financière à leur rapport de durabilité.

Dans ce cadre, l’analyse de double matérialité constitue l’une des premières étapes de la préparation au reporting CSRD, avant même l’application des normes ESRS (European Sustainability Reporting Standards).

L’entreprise doit en effet commencer par identifier, prioriser et gérer ses IRO (Impacts, Risques et Opportunités) c’est-à-dire ses enjeux ESG les plus importants, pour déterminer précisément quelles informations inclure dans son rapport de durabilité.

Une analyse exigeante mais stratégique

Réaliser une analyse de double matérialité est une démarche rigoureuse qui mobilise de nombreuses fonctions internes et parties prenantes externes, et qui peut s’étendre sur plusieurs mois.

Cependant, ce travail représente une véritable opportunité stratégique. En identifiant précisément les impacts, risques et opportunités qui influencent à la fois la performance de l’entreprise et son empreinte globale, cette analyse offre en effet une vision claire pour orienter les décisions stratégiques et anticiper les transformations à venir.

L’analyse de double matérialité n’est donc pas seulement une obligation réglementaire, c’est aussi un levier essentiel pour bâtir une stratégie durable et résiliente !

Comment réaliser son analyse de double matérialité en 5 étapes clés

Avant de plonger dans la méthode, un point crucial : le processus de l’analyse de double matérialité n’est pas linéaire. Il implique des allers-retours, une mobilisation active de nombreuses parties prenantes, et des ajustements constants. 

Alors, armez-vous de patience, et préparez-vous à faire preuve d’agilité pour construire une vision ESG vraiment solide et pertinente !

1. Cadrer la démarche et le pilotage du projet

Pour réussir une analyse de double matérialité, tout commence par une gouvernance solide. Identifiez les acteurs à mobiliser sur le sujet : responsables ESG, équipes métiers, dirigeants et parties prenantes externes. Chacun doit jouer un rôle précis pour garantir une vision complète des enjeux.

Assurez un pilotage clair avec un chef de projet dédié, des objectifs partagés et un calendrier structuré. Enfin, embarquez les parties prenantes grâce à des actions pédagogiques, en valorisant leur rôle et en communiquant régulièrement pour maintenir leur engagement.

Cette étape est cruciale pour poser des bases solides et fédérer autour du projet.

2. Cartographier les enjeux ESG de l’entreprise

La deuxième étape consiste à dresser une liste complète des enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance de l’entreprise, en s’appuyant sur une démarche transversale qui mobilise à la fois les parties prenantes internes et externes. 

Pour cela, impliquez les fonctions clés de l’entreprise (RH, finance, production…) et sollicitez vos clients, fournisseurs, et partenaires, pour une vision élargie et pertinente. Analysez toutes les données qui sont à votre disposition, et utilisez des outils adaptés, comme des questionnaires ou des ateliers collaboratifs, pour identifier tous vos IRO (Impacts, Risques, Opportunités) potentiels. 

Sachez par ailleurs que dans le cadre de la CSRD, vous ne partez pas d’une feuille blanche : les normes ESRS vous fournissent en effet une base obligatoire qui structure et oriente votre travail.

3. Évaluer la matérialité de chaque IRO

Une fois les IRO identifiés, il est essentiel de mesurer leur importance en s’appuyant sur des critères précis et des échelles d’évaluation adaptées.

Commencez par définir des critères clairs et justifiés pour analyser chaque enjeu, comme :

  • Le type de matérialité : identifiez si l’enjeu relève de la matérialité d’impact, financière, ou des deux.
  • La qualité de l’impact : déterminez s’il est positif ou négatif.
  • Le type d’effet : précisez s’il est avéré ou potentiel, et, dans ce dernier cas, estimez la probabilité qu’il se réalise.
  • La gravité de l’impact : jugez l’ampleur, l’étendue, le caractère d’irrémédiabilité, et les possibilités de remédiation.
  • Les horizons temporels : distinguez les impacts à court, moyen ou long terme.

Ensuite, élaborez un système de cotation personnalisé, par exemple une échelle de 1 à 5, pour quantifier chaque critère. Précisez un seuil à partir duquel un enjeu devient matériel, c’est-à-dire significatif. 

Ce système doit être simple, transparent et compréhensible par toutes les parties prenantes.

En appliquant ces étapes, vous pourrez hiérarchiser les enjeux de manière rigoureuse et mettre en lumière ceux qui nécessitent une attention prioritaire.

4. Consolider les résultats

Pour finaliser l’analyse de double matérialité, vous devez faire une synthèse claire des résultats. Dans le cadre de la CSRD, il s’agit de déterminer les IRO matériels, afin d'identifier les normes ESRS associées, ainsi que les “disclosure requirements” et les “data points”spécifiques à intégrer dans le rapport de durabilité. 

Pour structurer de manière claire et visuelle leurs résultats, la plupart des entreprises font le choix de construire une matrice de double matérialité, qui présente leurs IRO de manière hiérarchisée, en croisant leur impact sur la performance financière et sur les parties prenantes de l’entreprise.

Cette étape permet de transformer les résultats de l’analyse de double matérialité en un outil opérationnel pour le reporting.

5. Documenter la méthodologie suivie

N’oubliez pas de garder des traces précises et détaillées de la méthodologie employée pour votre analyse de double matérialité : identification des IRO, critères d’évaluation, système de cotation, construction de la matrice… Cela attestera de la robustesse de votre analyse et renforcera la crédibilité de votre reporting ESG.

Dans le cadre de la CSRD, c’est même une obligation : l’explication de votre méthodologie doit en effet être intégrée à votre rapport de durabilité. Cette transparence est essentielle pour anticiper le processus d’audit, où l’analyse pourra être challengée.

Alors documentez vos décisions clés, notamment les raisons pour lesquelles certains IRO ont été jugés non-matériels, en vous appuyant sur des critères objectifs. 

Ressources et outils pour réussir son analyse de double matérialité

Pour de nombreuses entreprises, l’analyse de double matérialité est un processus nouveau, perçu comme complexe. Heureusement, des approches structurées et des solutions innovantes permettent de simplifier cette démarche essentielle.

L’EFRAG (European Financial Reporting Advisory Group), le groupe consultatif européen chargé de l’élaboration de la CSRD et des ESRS a par exemple publié une méthodologie pour aider les entreprises à mener leur analyse de double matérialité.

Il existe par ailleurs des services spécialisés, ainsi que des solutions technologiques conçues pour faciliter le travail des entreprises sur le sujet.

Auxo Dynamics, par exemple, propose une solution innovante qui combine expertise humaine et technologie de pointe : 

  • Nos experts en durabilité analysent vos données financières et extra-financières pour construire un référentiel parfaitement adapté à votre contexte. 
  • Grâce à une plateforme collaborative, vous pouvez identifier vos enjeux prioritaires, produire votre matrice de double matérialité, et travailler en temps réel avec vos parties prenantes. 
  • Auxo vous garantit une méthodologie 100% conforme à la CSRD, assurant ainsi une validation fluide de votre rapport par les auditeurs.

Pour conclure, l’analyse de double matérialité représente une première étape essentielle dans le processus de reporting et de conformité à la CSRD. Plus cette analyse sera menée avec rigueur et précision, plus elle simplifiera les étapes suivantes, notamment la collecte de données, la rédaction du rapport et son audit. 

Miser sur les bons outils, méthodologies et experts est donc un investissement stratégique pour garantir la qualité et la conformité de votre démarche !